prises de positions.
Des disques punk vendus selon une stratégie commerciale définie, renvoyant à autant d’études demarché, d’analyses de la pertinence du support face à la « crise du disque » … Des concerts calqués sur les dynamiques de la culture marchande, comme autant d’échos à la logique du Spectacle. Des enseignes de prêt-à-porter qui capitalisent sur le renouveau du rock, sur la capacité de son esthétique rebelle à vendre encore un peu plus. Des fast foods, magazines de cuisine et de bricolage se posant en donneurs de leçons, en spécialistes du « do it yourself », le décontextualisant consciencieusement de sa dimension politique, en faisant de ce dernier quelque chose plus que jamais policé et inoffensif. C’est plus globalement contre cette apathie grandissante, nous résignant doucement et toujours un peu plus et un peu plus fort que nous prenons position, face à laquelle nous avons décidé d’écrire ces quelques lignes. Parce que nous considérons que la situation actuelle n’est pas un état de fait, que la musique alternative dans sa résignation et dans son manque de perspectives ne nous convient pas. Nous ne voulons pas nous satisfaire du peu. Il serait absurde de continuer d’envisager le punk comme encore subversif en Occident, et il serait bon de questionner sa portée révolutionnaire dans le monde d’aujourd’hui ; le contexte politique et social comme nos perspectives – collectives et individuelles – ne sont plus les mêmes. La démonstration de la récupération capitaliste de la sous-culture que semblait incarner le punk n’a plus besoin d’être faite ; autant qu’elle a réussi le tour de force de limiter celle-ci à une « esthétique », elle a balayé certains acquis militants (ou au moins prises de position) que le punk avait contribué à mettre en relief ces trente dernières années – de la remise en cause du travail, de l’argent, des rapports sociaux, de la réussite sociale, de la starification, etc – à grand coup de marketing et de communication. Le coup peut sembler rude, certes, mais il ne tient qu’à nous de nous réapproprier nos codes, de clarifier nos positions et d’assumer un discours politique. S’en remettre au fatalisme, rester là les bras croisés en se disant qu’on ne peut rien faire, parce que tout est déjà perdu ne nous convient pas, accepter l’idée que tout est joué – sans nous – revient à s’en remettre à la logique du pire. Il n’y aura jamais mieux si nous-mêmes ne cherchons pas à produire quelque chose de plus juste, plus en accord avec ce que nous mettons derrière cette idée de « punk ». Se remettre en question est un exercice long et souvent difficile, mais nous avons toutes et tous à y gagner ; au milieu de la pression du déterminisme il ne tient qu’à nous d’essayer d’y trouver des interstices, des marges de manœuvre…
Nous tenons à l’étiquette « do-it-yourself », celle-ci fait sens selon nous, non pas pour le côté strictement artisanal de la pratique, mais parce qu’elle traduit un choix politique. A nos yeux, ce n’est pas quelque chose que nous réduisons simplement à du bricolage, elle revient aussi à une prise de position. La mise en pratique de l’idée de DIY n’est pas une solution en attendant mieux, elle n’est pas un moyen d’avoir l’air crédible en apportant un quotient « underground » à nos activités. Ce n’est pas « un choix comme un autre ». Nous nous reconnaissons dans une telle démarche car celle-ci tend à déconstruire les rapports de dominations qui régissent le monde de la musique. Nous nous tenons à l’écart des fossoyeurs de notre microcosme et charognes carriéristes qui rêvent de faire leurs classes ici bas en attendant de « percer ». Nous crachons volontiers aux visages de celles et ceux qui s’approprie le DIY comme un tremplin vers une gloire fantasmée, simplement parce que la pratique de cette musique ne peut pas être un bête copié/collé de la musique FM dans un cadre restreint. Nous voyons dans le « do-it-yourself » et plus généralement dans les pratiques contre-culturelles, des leviers pour affronter – et foutre en l’air – le Vieux Monde, pour nous rassembler et nous organiser collectivement.
Formulé ainsi, on prend conscience de l’aspect idéaliste de ces quelques lignes, mais au fond c’est bien cela dont il s’agit : lancer une première bouteille à la mer, enfoncer les premières portes avec la volonté de construire des lieux communs pour chacune et chacun d’entre nous.
Dans l’état actuel des choses, Chaviré nous sert de réponse à l’apathie, à l’apolitisme et à la résignation générale, ce n’est pas grand chose mais c’est déjà ça.