[i]mercredi 27 juillet 2005
Festival Fury Fest : 500 000 EUR d’ardoise
Lourdement endetté, il ne paie plus ses salariés
Avec 30 000 entrées, le Fury Fest devait normalement équilibrer son budget.
Rififi au Fury Fest. Le plus gros festival français de « musiques extrêmes », fin juin au Mans, laisse une ardoise d’au moins 500 000 EUR. Des prestataires portent plainte, le directeur artistique attend trois mois de salaire. Et de vrais bulletins de paie.
LE MANS. - Guitares électriques et chèques en bois. Organisé du 24 au 26 juin, au Mans, le Fury Fest, plus gros festival de « musiques extrêmes» de l’Hexagone, traîne une dette d’au moins 500 000 EUR : 300 000 EUR investis avant les concerts, 200 000 EUR à verser aux prestataires. Qui s’impatientent. Deux loueurs de véhicules et chariots de la région mancelle portent plainte pour escroquerie et abus de confiance. Le brasseur et la société chargée de la régie attendent aussi les sous.
Monté sans subvention publique, le festival, dont le budget dépasse 1,3 million d’euros, dépend d’une double équipe : une association et une société privée, la SARL Fury Events, filiale du groupe de presse allemand Independent Media. Le compte en banque de l’association tient la marée. L’entreprise fait naufrage. « Pour l’instant, il n’y a pas d’argent pour payer tous les fournisseurs », reconnaît Maurice Nakache, président de l’association et co-gestionnaire de la SARL.
La solution ? « Dans un premier temps, on recapitalise. Si ça ne marche pas, on fait jouer l’assurance », explique Maurice Nakache, qui réalise aujourd’hui que « dans le feu de l’action », certains prestataires ont été payés deux fois : « On avait deux bureaux séparés, certains fournisseurs se sont adressés à nous et à la production pour demander des remboursements. En trois jours, on a sorti plus de 800 000 EUR. Mais nous allons honorer nos dettes. » Quand ? Flou artistique sur la date.
« Ils ont tué le Fury Fest »
Plus grave : les deux salariés de Fury Events font les frais de pratiques douteuses. Depuis trois mois, Benjamin Barbaud, directeur artistique, et Yoann Lenevé, son assistant, ne touchent plus un centime. Et découvrent qu’aucune cotisation patronale n’a été versée depuis la signature de leur contrat, en septembre. Résultat : les deux jeunes Nantais ne peuvent toucher l’allocation chômage ni trouver du travail ailleurs. « On a demandé un licenciement économique. On n’arrête pas d’appeler, mais à Munich, c’est silence radio. Ils ne paient plus le loyer. Dans quinze jours, le proprio nous vire des bureaux. » D’autant plus gênant que Benjamin Barbaud, fondateur du festival, s’est endetté pour acheter une maison.
Aujourd’hui, le fan de hardcore s’interroge : « C’est impossible qu’il manque autant d’argent. On a fait 30 000 entrées et vendu deux fois plus de bière que l’an dernier. » Bluff des « partenaires » d’outre-Rhin partis avec la recette du bar ? La rumeur mousse. Comme le dépôt de bilan. « Il n’y a jamais eu de comptable, la billetterie, c’était n’importe quoi, enrage Benjamin Barbaud. Ces gens ont tué le Fury Fest."
Jérôme LOURDAIS.
Ouest-France du mercredi 27 juillet 2005[/i]